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lundi 24 octobre 2011

Rencontre avec Marlène Lanoix auteure de "Morceaux de vie"

Crédit photo D. Lancastre
Quoi que l’on pense, la valeur d’une société repose non seulement sur la grandeur intellectuelle et culturelle des hommes qui la composent et qui ont toujours su garder la tête hors de l’eau, mais elle repose aussi sur la persévérance de ceux qui volontairement s’enfoncent davantage tous les jours sans crier au secours.
C’est aussi de la grandeur.
C’est l’extrême forme de dénonciation, la pire.
La conscience des autres.

Je rêve de m’abêtir
.





Crédit photo D.Lancastre


Marlène Lanoix en compagnie de Dominique Lancastre lors de la journée mondiale de la misère et de l'exclusion à la bibliothèque des Trois îlets. Marlène Lanoix avait fait le déplacement pour  s'entretenir avec les enfants de l'école des Trois-îlets pour donner sa définition de la misère et de l'exclusion, participant ainsi à un débat avec l'auteur de la Véranda Dominique Lancastre.



Reprise de l'interview de France Antilles (source)

INTERVIEW de Marlène Lanoix écrivaine : « Partager des émotions par la lecture »

Propos recueillis par J. C.-B. France-Antilles Martinique 14.03.2011
« Je lisais tout ce qui me tombait sous la main! C'était le seul moyen de s'évader d'un quotidien difficile, la possibilité de se réfugier dans un monde imaginaire »

Reçue à la médiathèque, à l'invitation de la ville du Morne-Rouge, pour présenter son « Morceaux de vie » , Marlène Lanoix parle de sa passion pour les mots.

Engagée dans la vie associative notamment pour la défense de . l'environnement mais aussi sur les questions de la parentalité, acteur de la vie politique locale, on vous découvre aujourd'hui femme de lettres. Comment vous présenteriez-vous aujourd'hui ?
J'ai maintenant 60 ans. Je suis originaire du Vauclin et je suis la troisième d'une famille de huit enfants. Comme beaucoup d'entre nous, je suis partie en France tenter ma chance. J'avais 25 ans et j'y ai passé six années avant de revenir en Martinique. Je travaille aujourd'hui pour une collectivité et j'ai deux grands garçons, des hommes devrais-je dire! J'ai toujours eu la passion de lire. A l'école d'abord où j'ai dû lire tout ce qu'on m'a proposé, à la maison ensuite où le Reader's Digest nous faisait découvrir le monde. Tout était bon à lire! C'était aussi le temps des correspondants avec lesquels on échangeait les nouvelles de nos quotidiens.
Vous nous présentez aujourd'hui votre deuxième ouvrage, « Morceaux de vie » . Le premier, « Le mari des autres » , a été publié en 2003, autrement dit hier. Comment et pourquoi êtes-vous venu à l'écriture ?
« Morceaux de vie » est en réalité le premier recueil que j'ai écrit. C'est le fruit de réflexions très personnelles que j'ai couché sur le papier au jour le jour. Du fait de leur caractère autobiographique, j'ai longtemps préféré, par pudeur, les garder par derrière moi. Et puis, je suis tombée, dans un magazine féminin, sur un article. Ce qu'il en ressortait, c'est que l'amour était meilleur avec le mari des autres! De là est né mon premier roman. Sous couvert d'une écriture fraîche et légère, j'y analyse la structure familiale antillaise et singulièrement la place des femmes.
Le ton de « Morceaux de vie » est plus grave, intime aussi vous l'avez dit. Pourquoi avoir franchi le pas de la publication ?
L'accueil fait à ce premier roman a été le déclic. J'ai remis en forme ces « morceaux de vie » qui, s'ils parlent de mon expérience, dans la simplicité ou la douleur mais sans être fixé dans un temps linéaire, peuvent susciter une certaine identification, car je crois que l'émotion est universelle. Partager des émotions par la lecture ou l'écriture peut aider à supporter les difficultés, à dédramatiser des situations en voyant qu'on n'est pas seul et qu'à une situation identique il y a une infinité de dénouements possibles.
« Morceaux de vie » , Lyon, Éditions Baudelaire, 2010.
« Le mari des autres » , Case-Pilote, Éditions Lafontaine, 2003.

dimanche 2 octobre 2011

"La belle amour humaine" de Lyonel Trouillot


Comme chaque mois nous proposons un roman sélectionné par un lecteur. Mais , lorsque le lecteur est écrivain lui même, on peut s’attendre à une sélection des plus exquises. Ernest Pépin poète et écrivain guadeloupéen nous propose de découvrir le dernier Lyonnel Trouillot. Romancier et poète, intellectuel engagé, acteur passionné de la scène francophone mondiale, Lyonel Trouillot est né en 1956 dans la capitale haïtienne, Port-au-Prince, où il vit toujours aujourd’hui. Son oeuvre est publiée chez Actes Sud : Rue des Pas-Perdus (1998 ; Babel n° 517), Thérèse en mille morceaux (2000), Les Enfants des héros (2002 ; Babel n° 824), Bicentenaire (2004 ; Babel n° 731), L’Amour avant que j’oublie (2007 ; Babel n° 969) et Yanvalou pour Charlie (2009 ; prix Wepler 2009).


Lyonel Trouillot 

Lyonel Trouillot nous revient ici avec « La belle amour humaine » publié chez Actes Sud cette année.Ernest Pépin écrivain guadeloupéen dit:


Je  suis suffoqué par le beau roman de Lyonel Trouillot «  La belle amour humaine ». Je dis Je parce que ce roman m’a pris par la main comme si j’en étais le seul lecteur. A l’évidence c’est le roman de la maturité lorsque le talent fait corps avec l’auteur et cisèle des éclats de voyance qui loin de nous aveugler console toutes les nuits.
J’ai presque envie de dire que c’est la plus belle réponse donnée au séisme car c’est un éloge à la vie.
Qui ne se souvient de la formule de Jacques Stephen Alexis. ? Notre Alexis vers lequel, de temps à autre, nous nous penchons pour récolter le beau soleil des âmes. Certains auteurs s’en souviennent et font trembler les mots avec l’élan d’une philosophie imparable : celle de la belle amour humaine.
L’histoire démarre comme un conte et de boucles en boucles, de récits de vie, en récits de vie, converge vers la question centrale : Quel usage faut-il faire de sa présence au monde ?
Certains l’ignorent tel le colonel Pierre André Pierre pour qui la vie se résume à la brutalité. Cette violence pachydermique qui écrase l’autre en dehors de toute considération convaincus que le pouvoir de l’uniforme et des armes en imposait parfois aux dieux. D’autres l’esquivent comme l’homme d’affaires Robert Montes onctueusement cynique et cyniquement onctueux. Deux existences totalement différentes en apparence mais qui cultivent l’amitié du Mal. Et puis, il y a les habitants d’Anse-à-Fôleur ! La sentimentale marchande d’illusions, l’accueillant Justin législateur du bonheur, l’oncle aveugle et peintre, Solène et tant d’autres ! Ils sont l’antidote, malgré la maladie de la mer, d’un monde qui racle sa pauvreté même pour trouver un rien de bonheur ! Ce rien de bonheur qui adhère à la vie comme une limace sur un mur.
La question du Bien et du Mal étant posée, Lyonel Trouillot nous emmène dans plusieurs mondes où l’art, l’amour, la mémoire, l’innocence même, s’emmêlent, se détachent, suivant le débit du « raconteur », souffleur intime de la parole de Thomas qui engendre les lieux, les personnages, les sentiments, les  émotions, tout en conduisant Anaïse vers sa destination et sa révélation.
Par notations discrètes, par touches successives, par clapotis de la parole, se dessine devant nous, un paysage humain aux polarités multiples, aux diversités extrêmes (Nord-Sud), mais à la trame sensible et mystérieuse. La belle amour humaine est là devant nous, entre voyage dans l’espace, voyage intérieur, errance existentielle, comme si les hommes ou les peuples n’étaient que des carrefours de mots, des sonates de nuits, des tangos de mer, des souffles d’amour qui sèment des rêves que nul ne peut conjurer.



C’est Anse-à-Fôleur ! C’est Haïti et ça ne l’est pas ! C’est la vie ! C’est un  rideau levé sur le sens de la ronde humaine. La vie n’est jamais qu’un ouvrage collectif ! Eh oui ! Quel usage faire de ma présence ? La réponse est dans la question même !
La belle amour humaine n’est pas seulement un roman haïtien c’est une fable universelle ! A cela se mesure l’écrivain. En cela assume t-il magnifiquement l’héritage de Jacques Stephen Alexis.
Chaque phrase est une sentence. Chaque sentence est une philosophie. Chaque philosophie renvoie à l’obsédante question du bonheur. Pour ma part, parmi tant d’autres,  je prends celle-là : toute personne devrait pouvoir être l’aide-bonheur d’une autre personne.
Lyonel Trouillot ou l’aide-bonheur de la littérature et des humains que nous sommes.

Ernest Pépin
Faugas/ Lamentin
Le 01 Octobre 2011